Laurence Huret – Une femme de coeur en Asie

MME LAURENCE HURET, MEMBRE DU SOUVENIR FRANCAIS DE CHINE DE LA PREMIERE HEURE RECOIT LES INSIGNES DE L’ORDRE NATIONAL DU MERITE

LAURENCE HURET – Une femme de cœur en Asie

En Asie depuis 20 ans, Laurence Huret a multiplié les engagements, menant de front une carrière professionnelle exigeante d’avocat, l’éducation de ses quatre enfants et de multiples responsabilités au service de la communauté des Français de l’Etranger, notamment comme élue à l’AFE pour l’Asie du Nord. Elle recevait le 15 février dernier, l’insigne de Chevalier dans l’Ordre National du Mérite. L’occasion d’une rencontre avec celle qui fut aussi Responsable des Editions du petitjournal.com à Hong Kong, Pékin et Shanghai.

Lepetitjournal.com : Vous vivez depuis 20 ans en Asie, comment cela a-t-il démarré ?
Laurence Huret – C’est une histoire d’amitié. Nous avions, mon mari et moi, un ami d’enfance dont les parents vivaient à Canton après plusieurs années en Birmanie. Mon futur mari est parti 2 mois en Chine sac à dos, l’année suivante nous avons sillonné ensemble l’Asie du Sud-est. Puis est venu pour Thierry le temps du VSN à Pékin.  Je faisais des allers-retours entre la France et la Chine, où je travaillais pour le Cabinet Gide Loyrette. C’était au lendemain des évènements de Tian An Men. La situation était difficile. Mais il y avait, par contraste, une énorme solidarité au sein de la communauté française. De Chine, nous sommes allés en Thaïlande, puis après un bref passage en France, nous sommes repartis à Hong Kong, où nous sommes restés 16 ans. Hong Kong est une ville fantastique, qui vibre, pleine d’énergie et de dynamisme. C’est une ville qui vous porte. Hong Kong est tournée vers le monde chinois, et nous découvrons maintenant avec Singapour une ville forte de ses aspects multiculturels, ancrée en Asie du Sud-est.

Comment les choses se sont-elles déroulées sur le plan professionnel ?
Mon parcours est tout sauf linéaire. Suivre son époux en expatriation est difficile à mener de front avec sa propre carrière, mais j’ai le sentiment d’avoir eu plusieurs vies formidables. Après Pékin, j’ai travaillé comme directrice juridique d’une société Française en Thaïlande. A Hong Kong, j’ai ouvert le bureau local d’un cabinet d’avocats français, tout en m’impliquant dans la vie associative, l’UFE, l’Alliance française,… sans oublier le Souvenir Français en Chine, aux côtés de son fondateur Claude Jaeck. Tout cela m’a conduit vers un engagement plus fort et une période d’élue à l’AFE pour l’Asie du nord. Et récemment je me suis initiée au journalisme en qualité d’éditrice du Petitjournal.com en Chine.

Cette non linéarité de votre parcours est-elle davantage une contrainte ou une richesse ?
Réussir à poursuivre une carrière d’avocate constitue un vrai challenge quand elle ne peut être menée de manière linéaire. En contrepartie, le fait de vivre en Asie depuis 20 ans, d’y avoir construit ses réseaux, d’avoir été en contact avec de très nombreuses sociétés françaises constitue aussi un acquis précieux. C’est un atout lorsqu’il s’agit d’approcher un dossier complexe. Cela permet d’avoir un regard différent. De manière plus générale, le fait de concilier mobilité et carrière professionnelle est un sujet qui me tient particulièrement à cœur. A Hong Kong, j’étais co-responsable d’un club de créatrices d’entreprise. Des femmes dynamiques qui avaient envie de s’exprimer professionnellement.

 Thierry Mariani, député UMP de la 11e circonscription des Français établis hors de France , Thierry et Laurence Huret, Olivier Caron Ambassadeur de France à Singapour

Parmi les vies que vous évoquez, il y a celle d’élue à l’Assemblée des Français de l’Etranger (AFE) …
En juin 2000, j’ai été élue à l’Assemblée des Français de l’étranger pour l’Asie du Nord, qui comprenait Hong Kong, la Chine, Taïwan, la Corée, le Japon et la Mongolie. Notre liste était composée de 9 personnes, tous trentenaires, pères ou mères de familles, impliqués dans les lycées français. L’AFE est une assemblée de 155 élus, avec 12 personnalités qualifiées, 12 sénateurs et les 11 nouveaux députés. Au moment de l’épidémie du SRAS à Hong Kong, les élus de l’AFE basés en Asie ont notamment joué un rôle important de soutien aux lycées français, confrontés à de réelles difficultés financières pour rester ouverts, alors que de nombreux élèves étaient rentrés en France. A titre personnel, ce type d’engagement m’a passionné. Il a été l’occasion de rencontres humaines extraordinaires et j’ai pu en tant que juriste m’impliquer avec passion comme vice-présidente de la commission des lois. Tous ensemble, nous avons réalisé de très belles choses pour la famille des Français de l’Etranger. Mais tout cela est vain, si l’on oublie sa propre famille. L’engagement au sein de l’AFE implique une forte disponibilité et de nombreux déplacements en France et dans sa circonscription, ce qui est très contraignant sur le plan familial. C’est la raison pour laquelle j’ai choisi à la fin de mon mandat, à ne pas en briguer un autre. J’ai cependant conservé des engagements locaux, au sein du Lycée Français ou dans le cadre de la Chambre de Commerce.

Comment se porte la communauté Française en Asie ?
En 20 ans, la communauté française en Asie a beaucoup augmenté. Si elle est encore réduite par rapport à celle d’autres régions du monde, c’est celle qui a connu la croissance la plus forte. Pourtant, s’installer en Asie devient de plus en plus difficile. On ne peut plus aujourd’hui débarquer en Chine sac au dos sans parler mandarin, il faut travailler son projet professionnel en amont. Par ailleurs, le coût de la vie, à Hong Kong comme à Singapour a considérablement augmenté. Il y a de plus en plus de contrats locaux et même les avantages des contrats d’expatrié sont réduits. Enfin, quand une communauté grandit, le nombre de difficultés et problèmes grandit également. Les accidents de la vie -décès, divorce, perte d’emploi,…- arrivent en expatriation comme en Métropole. A Hong Kong, nous avons créé l’année dernière une seconde association caritative pour venir en aide aux Français de Hong Kong en difficultés financières.

… il y a aussi votre expérience au petitjournal.com, comme responsable des éditions de Hong Kong, Pékin et Shanghai
En effet. Je gérais en direct l’édition de Hong Kong et, à distance, celles de Shanghai et Pékin. J’ai adoré cette expérience. J’ai énormément apprécié la complète autonomie dont j’ai bénéficié : être maître de ses choix rédactionnels, assumer tous les rôles. J’ai aussi aimé le fait de ne pas être seule: travailler en réseau, en collaboration avec Eric Ollivier mon associé. Ce qui fait la force du petitjournal et son intérêt, c’est que l’on fait aussi partie d’un réseau mondial. Cela permet de bénéficier de l’expérience technique des autres et de la notoriété du support. Nous avons assuré l’année dernière une formidable couverture des élections présidentielles et législatives pour les Français de l’étranger. Sur le plan personnel,  j’ai adoré interviewer des gens de toutes sortes, des entrepreneurs, des artistes, des ministres… Avoir l’opportunité d’interviewer le ministre de la Justice, Michel Mercier, quand on est soi-même avocate de formation, est une expérience très gratifiante.

Et maintenant vos prochains défis ?
Une nouvelle page de notre vie reste à écrire à Singapour. Nous y avons été merveilleusement accueillis par la communauté française, avec de belles rencontres, riches en amitiés. J’aimerais apporter ma pierre aux Français de Singapour, comme je l’ai fait à Hong Kong. J’ai quelques idées mais c’est encore trop tôt. Peut-être aurons-nous l’occasion d’en reparler plus tard.

Propos recueillis par Bertrand Fouquoire (www.lepetitjournal.com-Singapour) lundi 18 février 2013